Un long dimanche en train

Ulan-Bator Pékin en train, c’est départ 07h30, arrivée 14h30 mais… le lendemain, soit une bonne trentaine d’heures, le tout dans d’antiques wagons et sur des couchettes ayant connues tellement de corps que ça ferait des histoires à n’en plus finir. C’est long, Ulan-Bator Pékin.

Dehors de tout ce dimanche-là il n’y a rien que la beauté des steppes de la Mongolie, tout ce vide qui se passe de nous, on regarde sans rien dire, on regarde seulement.

Dans le compartiment on s’est réjoui, nous étions trois seulement, jusqu’à ce que le contrôleur installe avec nous un vieil homme affable qui s’est avéré par la suite un redoutable emmerdeur emplissant tout l’espace disponible de cartons lourds comme tout apparus on ne sait comment, et d’enfants grimpants les couchettes pour en redescendre aussitôt.

Après nous avoir pourri aussi toute la nuit avec des allers et venues incessants, au cours desquels les cartons s’évaporeront mystérieusement, il disparaîtra tôt le matin, refermant la porte sur un dernier regard impassible qu’il me jettera alors que je lui faisais un signe de la main.

Dans ces longues heures, nous aurons aussi passé la frontière, avec en sortie de la Mongolie le cirque habituel de valse des passeports, et cette scène irréelle, quand le train quittera la dernière gare du pays, de soldats posés tous les 30 mètres, au garde à vous, saluant d’un geste militaire la longue file des wagons.

Pour l’entrée vers la Chine, on nous fera tous descendre avec tous nos bagages pour rejoindre la gare où nous passerons des contrôles tout à fait similaires à ceux que l’on subit dans un aéroport, sourires inclus, agents anglophones, et grande efficacité.

Bien sûr, au passage, nous laisserons l’intégralité de nos empreintes (les dix doigts) pour alimenter la gigantesque base de données biométriques chinoise déjà bien riche de nous : chaque agent traitant a devant lui un écran sur lequel je distingue, en plus de données textuelles, pour chaque personne, deux photos (celle déposée à la demande du visa, celle du passeport) plus une acquisition vidéo live de l’individu devant le guichet, autant dire, du miam miam pour les IA policières. Tout va bien.

Les contrôles faits on reste en salle d’attente. La largeur des voies de chemin de fer de Mongolie et de Chine n’étant pas la même, il faut changer toutes les roues du train, rien de moins. Dommage, nous aurions pu donner un coup de main plutôt qu’attendre encore Pékin.

Dans le train, le dernier pour ce trip de déjà neuf ou dix mille kilomètres, juste avant l’arrivée, une femme brune, belle dans sa robe rouge à pois blancs, passera un long moment à la fenêtre, dans le couloir. Quand elle me passera près de moi, je sentirais son parfum de mystère.

La photo, c’est la façade de la gare où on change les roues, et de pays.

dbo Écrit par :

2 Comments

  1. Herve
    12 août 2019

    La femme en robe rouge et son parfum de mystère…
    Et sinin, la patronne va bien ?
    H?

    • dbourrion
      13 août 2019

      Elle m’attend avec le rouleau à pâtisserie

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